Le jour où l’UMP a perdu Nicolas Sarkozy

22 Mar

Il est difficile d’échapper depuis ce matin aux nombreuses réactions des ténors de l’UMP à la mise en examen de Nicolas Sarkozy pour abus de faiblesse dans l’affaire Bettencourt. Ainsi, Henri Guaino considérait sur Europe 1 que le juge Gentil, chargé du dossier « a déshonoré la justice » et lui demande de « venir devant les Français [pour] leur expliquer » alors que le secret de l’instruction existe. Pour Patrick Balkany sur RMC « Cette mise en examen ne semble pas être dénuée d’arrière-pensées politiques » avant de laisser s’échapper « Je vous emmerde » à l’avocat de l’ex-majordome de Liliane Bettencourt. Nathalie Kosciusko-Morizet, quant à elle, exprime dans un communiqué sa « grande incompréhension », jugeant que « rien ne [lui] paraît plus difficile à croire qu’imaginer Nicolas Sarkozy se livrer à un abus de faiblesse sur une vieille dame ». Beaucoup d’élus UMP ont aussi réagi  sur Twitter à l’instar des députés François Fillon, Eric Ciotti ou Lionel Lucca où de David-Xavier Weiss, secrétaire national de l’UMP « en charge des Industries de la presse ».

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Des attaques contre la justice à la théorie du complot, comment expliquer la nature des réactions à l’UMP ?

Rappelez-vous, c’était fin 2011, le monde entier découvrait stupéfait les images de Nord-Coréens pleurant la mort de leur dirigeant Kim Jong-Il. Comment était-ce possible qu’un peuple maltraité pleure le décès de celui-ci qui le condamnait ? Libération avait à l’époque interrogé Barthélémy Courmont, professeur de science politique à Hallym University en Corée du Sud et spécialiste de la Corée du Nord sur le sujet. Il disait alors : « Malheureusement, on peut y croire. Il y a sans doute beaucoup de sincérité. Un véritable culte lui était voué. A lui, mais à son père aussi, qui a été déclaré Président pour l’éternité à sa mort en 1994. Kim Jung-sung était le bâtisseur de la nation nord-coréenne, Kim Jong-il était la mère, toujours représenté de manière grave, protecteur. Il a eu 17 années de pouvoir très difficile et a incarné la résistance acharnée contre l’étranger auprès d’un peuple qui n’a aucune connaissance de ce qui se passe vraiment et qui se sent désormais comme orphelin ».

Sincérité, le mot est dit. Et les réactions des cadres de l’UMP à la nouvelle de la mise en examen de Nicolas Sarkozy, ne sont pas moins sincères. En effet, pendant les cinq ans de son mandat présidentiel, Nicolas Sarkozy a tellement personnalisé l’exercice du pouvoir, effet accentué par son omniprésence médiatique, que les personnalités de l’UMP ne peuvent se résoudre à la perte de leur chef. Personnalisation déjà lorsqu’il a présidé l’UMP de 2004 à 2007, parti qu’il a laissé en 2012 exsangue et hystérisé dont une des conséquences est la catastrophe qu’a constituée l’élection pour la présidence de l’UMP en novembre dernier. Tous sont orphelins de celui dont ils pensaient qu’il pourrait faire son retour en politique. La chute avait déjà été rude lors que Nicolas Sarkozy avait perdu l’élection présidentielle face à François Hollande, mais un espoir était tout de même permis. Là, avec sa mise en examen dans l’affaire Bettencourt, l’hypothèse d’un retour providentiel semble définitivement compromise alors que les mêmes médias qui restaient relativement silencieux aux révélations de Médiapart tournent aujourd’hui en boucle sur le sujet. Au regard, enfin, des nombreuses affaires que Nicolas Sarkozy va encore devoir affronter : Karachi, Libye, sondages de l’Elysée…

Reste que comme l’écrit Daniel Schneidermann dans sa chronique quotidienne : « C’est peut-être le seul moment où, dépouillés de leurs éléments de langage, ils [les politiques] se révèlent tels qu’ils sont. »

2 Réponses to “Le jour où l’UMP a perdu Nicolas Sarkozy”

  1. aucunsenspolitique mars 22, 2013 à 8:39 #

    Toutes les déclarations en provenance de l’UMP ne sont pas à mettre sur le compte de la douleur d’avoir perdu un être cher. Il y a aussi ceux qui expriment leur regret par calcul ou par intérêt. Tous les futurs candidats à la candidature de 2017 (Copé, NKM, Fillon, Wauquiez etc..) sont à classer dans cette seconde catégorie.

    • VictorSimonnet mars 23, 2013 à 12:46 #

      Pour autant, ils n’arrivent pas encore à passer outre la perte de leur chef, ni à s’organiser de manière apaisée (cf l’élection pour la présidence de l’UMP).

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